Pour clôturer sa saison professionnelle, le Théâtre de la Grange de Dorigny propose une création de Vincent Bonillo, $.T.O.r.M., librement inspirée de “Théorème” de Pier Paolo Pasolini. Un spectacle qui réfute tout tabou pour engendrer un questionnement social profond.
Le public venu assister à la première représentation de $.T.O.r.M. remplit peu à peu la salle alors que, dans la pénombre, on devine les silhouettes des acteurs, assis au fond de la scène. Les discussions cessent peu à peu, laissant place au silence. Finalement, l’autre moitié de la Grange s’illumine : c’est parti.
$.T.O.r.M., c’est l’histoire d’un artiste qui vient bouleverser l’apparente tranquillité d’une famille bourgeoise : tout comme dans l’œuvre de Pasolini, après le départ de cet étrange invité, leur vies ne seront plus les mêmes. La pièce se construit de façon plutôt ordonnée: suite à la présentation familiale, les déséquilibres de chaque personnage sont mis en relief par leur interaction avec l’étranger. Finalement, la disparition de l’artiste changera complètement l’existence de ce qui avait jusque-là l’apparence d’une famille idyllique.
Aux scènes de ménage s’intercalent les projections d’extraits de “Théorème”, ce qui permet de recentrer le discours sur des questions déjà présentes dans l’œuvre (livre et film au même titre) de Pasolini parue en 1968. Le décor simplifié met en relief le superbe jeu d’acteur des comédiens de la Compagnie Voix Publique, qui à l’aide d’improvisations sulfureuses remettent en question les concepts de réputation, pouvoir, possession, bonheur et sens de la vie. Submergés par des silences assourdissants, les spectateurs assistent à cette défaite familiale ainsi qu’à la remise en question de notre style de vie au sein de la société contemporaine : le vide de ces vies caricaturées nous envoûte. Le titre est bien choisi, car ce qui traverse la salle c’est une tempête d’émotions.
Texte: Céline Stegmüller