Le public a eu droit à une magnifique soirée chargée d’émotion et à un début de saison très prometteur au Théâtre le Crève-cœur à Cologny, sous la conduite de sa nouvelle directrice Aline Gampert. Celle-ci succède cette année à sa mère Anne Vaucher, et représente ainsi la troisième génération à la tête de ce petit théâtre si charmant, perché sur les hauteurs de Cologny, surplombant une fabuleuse vue de la Rade.
Le fil rouge de la première saison se veut un parallèle au vécu de sa nouvelle directrice et présentera ainsi des créations autour de la filiation et de la succession. Un thème qui permet de rassembler des œuvres très diverses en un ensemble parfaitement cohérent et qui constitue un très bel hommage à l’héritage familial.
La pièce « Léonie est en avance ou le mal joli » de Georges Feydeau est mis en scène par le talentueux Julien George. La première scène présente un jeune couple, Léonie et son mari Toudoux (les excellents comédiens Charlotte Dumartheray et David Casada), au son des contractions de la future maman. La jeune femme oblige son mari à marcher avec elle dans le salon, à se plier à tous ses caprices, ce qu’il accepte avec une résignation bienveillante. Le jeu des comédiens est superbe, les dialogues sont percutants et cocasses, les visages expressifs et les mimiques tellement drôles que de nombreux fous rires secouent la salle, subjuguée par le spectacle.
L’entrée en scène de la belle-mère, puis de la sage-femme et finalement du beau-père ajoutent encore au comique de la situation. Tous se liguent contre le pauvre Toudoux, qui malgré sa bonne volonté se retrouve toujours en porte-à-faux. La sage-femme lui parle avec une froideur glaciale, tout en lui montrant bien qu’il la dérange dans ses préparatifs pour l’accouchement, la belle-mère le traite avec suffisance et le beau-père avec dédain, lui faisant bien sentir la différence sociale qui existe entre eux. On reproche aussi au futur père que l’enfant soit en avance et qu’il naisse huit mois seulement après le mariage, ce qui pourrait faire jaser.
Lorsque Toudoux, inquiet, pose des questions à la sage-femme sur l’état de santé de sa femme et que celle-ci lui répond dans un jargon technique incompréhensible, qu’il fait mine de comprendre, on rit jusqu’aux larmes. La performance est remarquable, les dialogues sont savoureux, le ton enjoué et on ne s’ennuie pas une seconde jusqu’au rebondissement final !
Un merveilleux spectacle plein d’humour et de poésie, à voir jusqu’au 19 octobre 2014. Toutes les informations sur www.theatreducrevecoeur.ch
Texte: Sandrine Warêgne